" Le ju-jutsu, français et/ou mondial, n'a t-il pas son origine au japon ?"

 

 

Chronique octobre 2006-10-10

Le problème inquiétant du Ju-Jitsu en France ... Patatras, la nouvelle arrive dans mon « mail », je dis émile, alors que me promenant le long des remparts de Château d’Oléron, je venais de rencontrer Princesse, une magnifique chienne qui promenait par là son maître et ses camarades, des judokas qui ne demandaient certes pas tant de haine ou de considération.

Je lis donc :

Problème bien connu non seulement dans les milieux des arts martiaux, mais aussi de la police et de l’armée : à savoir que la discipline pratiquée, sous le nom de Ju-Jitsu, dans le cadre de la fédération de judo FFJDA apparaît bien loin de caractéristiques d’efficacité et de formation typiques de ce prestigieux art martial.

Ce qui donne lieu - ainsi que souligné par des experts de renom mondial - à des conséquences négatives « sur la formation professionnelle dans la police, l’armée, la gendarmerie et sur celle de citoyens à la personnalité équilibrée, solide et souple en même temps, en mesure de donner un apport sensiblement positif à eux-mêmes et à la société ».

Un problème donc d’intérêt public considérable.

Je ne suis pas Français donc je ne peux être qualifié de partisan ou d’opposant, je ne suis pas fédéré judo tout en me flattant d’avoir tiré à l’occasion avec Pariset et Coche, pour citer deux Français qui me semblent – encore - un peu connus  

Tiens, à ceux d’Oléron, combien de « détracteurs » sont-ils venus leur dire : votre bazar c’est de la gnognotte ! Les affirmations matamoresques de ce texte me rappellent mes débuts, en un temps ou avec Georges Leroy, nous rendions des visites éclairs dans des dojos où le professeur était curieusement absent ce jour-là, cela me rappelle l’époque où, ma ceinture verte entourant mon keikogi roulé, je naviguais de ports en ports, fréquentant Anvers et Hambourg, Marseille et Le Havre, Brest et Bordeaux. J’en ai rencontré des maîtres, des listes impressionnantes, qui sont restés assis sur leur chaise quand j’ai foulé leurs tatamis, en ces temps-là, souvent des tapis, parfois des bâches... mais il y eut aussi des enseignants convaincus, des professeurs merveilleux, des champions humains, et parfois un homme hors du commun. Grâce à ces derniers, j’ai gagné une ceinture noire. Georges Leroy m’a appris le jiu-jitsu, Minoru Mochizuki m’a appris l’art martial.

Et je ne peux m’empêcher de sourire et puis de dire très peu courtoisement, voire même vulgairement : Merdalors, on en est encore là ! On en est toujours là, l’ignorance TOTALE de ce fameux grand public qui commence à me courir sur le haricot !

 

Ceux qui me connaissent et ceux qui sans m’avoir rencontré me font l’amitié de me lire depuis plus de quarante ans savent quel attachement j’ai pour le jiu-jitsu et son enseignement. Ils liront donc sans surprise que je me roule de rire, c’est le mot ! à l’écriture pompeuse de ce dixième dan ! Lire sans s’esclaffer : .../... la International Ju Jitsu Fédération (IJJF) organisme qui depuis 1968, est "l’organisation-mère mondiale de tous les styles de l’art martial japonais Ju Jitsu .../... m’est réellement impossible. Pauvre homme qui n’a pas dû voyager beaucoup dans le Japon avant 68, encore moins après 1990 ... Bien entendu, chacun sait dans le milieu du judo que le jiu-jitsu, ancêtre du judo, était un ensemble de procédés de défense comprenant : projections, strangulations, torsions, élongations et coups. Incontestablement l’autodéfense était sans doute la plus ancienne des sources du jiu-jitsu devenu judo, sa raison première.

Le judo, c'est le combat codifié, l'art martial passé dans le domaine du sport, avec toutes ses vertus d'origine et ses qualités éducatives. Mais, par souci d'efficacité réelle autant que par respect de la tradition, une place devait être gardée à ce qui faisait du jiu-jitsu l'arme à mains nues par excellence. C'est la raison pour laquelle Jigoro Kano avait élaboré le kime-no-kata, exercice modèle de défense contre toutes les agressions.

Kawaishi avait, lui, mis au point, en même temps que sa méthode d'enseignement du judo, une méthode très complète de self-défense. Cet homme simple ne s’appelait pas pompeusement maître et n’avait pas eu la prétention d’appeler ces techniques Jiu-Jitsu. Cette discipline lui était connue pour l’avoir comme quelques uns d’entre nous, pratiquée « réellement » et par la noble idée transmise par le KOSHIKI-NO-KATA, lequel consiste en une suite d’exercices de style, dont on peut même dire que la pratique a un caractère nettement mystique, et qui vise à la fois à mettre en relief la beauté du geste et à bien montrer que l'officiant a parfaitement assimilé la maîtrise d'abord spirituelle, ensuite technique, du combat ainsi illustré dans son ensemble martial et dans chacun de ses procédés.

Sans la conquête spirituelle, l’efficacité n’existe pas.

Dans la progression française actuelle du jiu-jitsu enseigné à la FFJDA, selon ce que j’en connais par les dire et pratiques de bien des camarades, je constate qu’une part intéressante est faite aux techniques malgré la difficulté que représente cette étude pour des élèves qui n’y consacrent le plus souvent que deux à trois heures par semaine et par délassement, pour la plupart d’entre eux.

Le JIU JITSU est un art martial, pas une technique d’auto défense, pas un sport de compétition, pas un programme de tueurs patentés légaux ou non. L’autodéfense, le close combat, et des centaines de disciplines incorporent des techniques plus ou moins issues de l’enseignement traditionnel du jiu-jitsu, ça ne leur confère en rien le titre de Jiu-Jitsu, ce n’est pas du Jiu-Jitsu.

Pour tout homme raisonnable, la discussion s’arrêterait ici, il dirait ah bon, ce n’en n’est pas, il n’y a donc RIEN à dire mais voilà ... Les clowns et les montreurs d’ours auront longtemps encore la langue fourchue ... Les faux titres fleuriront des siècles durant encore au sein d’une humanité avide de récompenses inutiles et totalement imméritées. Voulez-vous un diplôme de docteur en philo, en science pot, en pitrerie télévisée, je vous file les coordonnées de l’université Usamania et moyennant quelques euros (enfin, beaucoup de dollars, veux-je dire) vous voilà master et couvert d’awards, de coupes, de médailles, de postères et de lauriers... Revenons à l’art martial, des titres de tous les dans que vous souhaitez sont disponible sur Internet, plus même besoin de se déranger (et la vogue fonctionne déjà bien pour les autres « produits » du Sud-Est asiatique ou de Corée et de Chine). L’UNESCO vous reconnaît même comme patrimoine mondial, bientôt the Suprême pyramidal object avec le maître momifié, le culte de la personnalité et l’intégrisme sectaire n’est pas l’apanage des religieux papistes ou islamistes.

 

Dire que les techniques de combat sont aussi anciennes que les hommes n’est pas à rappeler ou faut-il encore le répéter souvent ?

 

Ainsi donc, des milliers de techniques et d’ensembles de techniques ont été inventées et perfectionnées. Les ensembles et sous-ensembles ont été nommés et dans chaque région du monde se sont affinés et ont évolué vers les sociétés modernes qui peuplent la Terre.

 

De nombreux éléments communs existent et les méthodes de combat à mains nues sont si nombreuses que l’on ne peut raisonnablement définir quelle est la meilleure, tant soit-il qu’il en existerait une supérieure aux autres.

 

Dans l’évolution des techniques, certaines sont oubliées, d’autres ressurgissent, réinventées pour des besoins nouveaux.

 

La société actuelle européenne du début du troisième millénaire ne ressemble pas à la société qui peuplait cette région du globe il y a cent ans à peine Il est donc logique et naturel que les manières de considérer le combat à mains nues et ses finalités aient évolué et que des prises de conscience différentes existent quant à ces méthodes et leur enseignement.

 

Dans le cas particulier de la discipline appelée JIU JITSU (que l’on écrira ou prononcera à sa guise), on se souviendra d’abord qu’il s’agit d’une discipline complexe dont les origines sont typiquement japonaises (ce ne sont pas les apports indiens, mongols et chinois qui font l’âme de cette méthode).

Cette prise de conscience n’empêche pas de remarquer que nombre de dessins de Dürer (quinzième/seizième siècle allemand) ressemblent farouchement à des esquisses de mouvements toujours étudiés de nos jours dans les dojos et que les lansquenets et autres piqueurs de hallebardes de ce temps n’avaient même pas idée que le terme jiu-jitsu existait et pas même celui que le Japon était un pays de l’autre côté de la Terre.

 

Régulièrement, il est important de resituer historiquement la discipline que l’on pratique et d’en comprendre ainsi, mieux, les tenants et les aboutissants. Régulièrement aussi l’enseignant est confronté à quelques questions exprimées par les novices et le grand public : Combien d’adversaires avez-vous tués, qui est le plus fort, qui est le champion, comment casse-t-on une brique, est-ce que cela fait mal, ... et puis plus insidieuses, votre méthode est-elle agréée, est-elle meilleure que celle du voisin, est-elle la plus efficace, quid de vos diplômes, avez-vous une carte d’affilié, êtes-vous membre du parti, si j’ai les pieds plats puis-je faire du jiu-jitsu ? Est-ce la même chose que le wa justsu, le sudoku est-il plus facile, les tchimboum tralala ...

 

Je demanderai un effort considérable à ceux qui posent la (les) questions aujourd’hui : merci de relire les chroniques précédentes où se trouvent les réponses (à tout le moins des réponses) (ils y trouveront également quelques détails me concernant, ce qui leur permettra de comprendre que je sais de quoi je leur parle) sans s’attacher à la particularité franco-belgo-luxembourgeoise des sociétés, fédérations, associations ... La question est sous-tendue par une demande de l’un d’entre nous, inquiet peut-être, déstabilisé par les pressions extérieures, qui sait ? :

 

Que pensez-vous du Jujitsu Français de la FFJDA?

 

La question n’est pas anodine puisqu’elle se situe chronologiquement après un événement, connu de quelques uns, qui a mis en cause la fédération française de Judo et un organisme auto proclamé où trône un certain Surace. (Ce n’est pas péjoratif, c’est semble-t-il le patronyme d’un monsieur qui se déclare me dit-on dixième dan de jiu-jitsu.) J’ai, sur la liste de communications attachée au site 100% JuJitsu de l’ami Sutefuan, donné il y a quelque temps un avis sur les techniques présentées sur le site web de cette école mondialisante (faut vivre avec son temps !) dont le power big chief semble être ce dénommé Surace et donc on sait ce que j’en pense. Dans les chroniques que j’ai écrites au début des années quatre-vingt, j’ai parlé régulièrement de ce que j’appelais à l’époque « les marchands de saucisses » ... ils n’ont pas disparu, au mieux, ils s’appellent désormais kings of the hotdogs.

 

Du Jiu-Jitsu français (sic !) pratiqué à la FFJDA, je ne pense strictement rien, le terme français accolé me rend transi, le Jiu-Jitsu ne saurait être français. Soyons clair, certains ont appelé des méthodes plus ou moins intéressantes jiu-jitsu mais ont rapidement modifié le nom de leur école ou de leur méthode, c’est ainsi que Roland Marotaux qui passa comme beaucoup d’entre nous à la montagne Sainte Geneviève s’intéressa au jiu-jitsu mais finalement intitula son école AIKI-GOSHINDO plus récemment japonisée en MAROTO-HA, on trouve un autre pratiquant qui, par osmose peut-être, a intitulé sa méthode : AIKI MAKOTO, on ne sait pas très bien qui copie qui, qui s’inspire de qui, le cas est fréquent et les disputes de clocher sont traditionnelles sur l’ancien territoire des Gaules. Ainsi Alain Guingois élève dudit Maroteaux créa, dit-il, le Goshinkaï s'inspirant, non pas du Goshinkaï du toujours prolixe Maroteaux mais de techniques énergétiques chinoises et des arts martiaux japonais. Que disent Sailly et d’autres, eux-aussi ayant connu les turbulences de l’Hakko (jiu jitsu !) importé par Maroteaux (encore lui – qui décidément a fait beaucoup, le pire et le meilleur !) mais aussi disent-ils parfois par Quéro ou Thierry Riesser Nadal. Cocatre, Lalande, Correa, Porras, Masnière et bien d’autres encore ont fait de même. Exit donc, les jiu-jitsu de formes diverses créées par des personnages attachant ayant les uns et les autres des qualités évidentes et des défauts aussi grands. Ce qui ne porte aucun jugement de valeur sur leur enseignement réel, quel qu’en soit le nom.

 

A la FFJDA, on se souviendra de l’époque Courtine et Pariset et des luttes de pouvoir interne avec les anciens du collège des ceintures noires qui eux pratiquaient encore les fameuses techniques de self-défense mises au point par Kawaishi.

 

Le jiu-jitsu enseigné par les écoles affiliées à la FFJDA est un complément au cours de judo qui a été ajouté à la suite de l'apparition de l'Atémi Jitsu de Bernard Pariset et de ce qui s'en est suivi. C'est une belle initiative mais elle a créé une confusion de plus dans la tête des novices et des étudiants de la FFJDA (et des autres ligues apparentées). Je pense que c’est de cette confusion que tentent de tirer profit certains enseignants qui ne visent qu’à obtenir quelques subsides étatiques et autres reconnaissances, ah oui, l’ Unesco ! Sûr qu’il y a un quinzième ou un trentième dan qui y pontifie et octroie ainsi des titres de reconnaissance universelle. Au lieu d’un nom d’organisme international, j’aurai préféré lire un nom de personnage que l’on peut rencontrer en chair et en os.

 

Je pense qu’une erreur fondamentale a été commise en assimilant judo et jiu-jitsu au sein d’un enseignement globalisé qui non seulement n’y était pas préparé mais qui dans son ensemble tirait autour de lui un monde de « compétition » et de course aux titres sportifs. Le judo moderne est un sport, le jiu-jitsu n’en est rien. J’avais attiré l’attention il y a plus de dix ans en Belgique sur cet état de fait quand Madame Leleu, excellente judokate s’était lancée dans l’aventure du fighting etc...

Il est impossible de faire de la compétition de jiu-jitsu, art qui ne se prête en rien au subterfuge et aux règles sportives et donc venir m’expliquer en long et en large que des gens de telle ou telle école sont venus ridiculiser des pratiquants de la FFJDA me ramène aux combats ridicules de Padoubny et autres Dubois, refusant d’accepter qu’à nouveaux siècles, nouvelles formes de vie. En d’autres lieux, John Wayne aurait sorti son colt et le prétentieux martial serait passé de vie à trépas. Ippon !

 

On ne compare pas des choux fleurs et des abricots.

 

En se perfectionnant techniquement, le JiuJitsu enseigné à la FFJDA peut devenir plus attrayant et « efficace » (ça veut dire quoi ?) s’il consent à quitter les réflexes sports pour intérioriser les techniques et le cas échéant les remettre sur le terrain qui n’est plus alors un dojo. Mais ce n’est aucunement le but du jiu-jitsu.

 

Il existe de nombreuses écoles de combat de rue, de combat des chefs, de combat de coqs ! Rien à voir avec notre discipline dans laquelle n’existera jamais de « coupe du monde de quoi que ce soit d’autre que de démonstration de pureté technique encore faudrait-il trouver un jury capable, comment décerner des titres autres que sympathiques à un artiste ?

Quant à réunir un comité d’honneur comptant les plus illustres maîtres du monde, cela m’étonnerait beaucoup, je ne connais aucun maître qui se dérangerait de ses habitudes et de son dojo pour assister à un show parisien, mais sans doute la notion de maître est-elle élastique.

 

Shin tai jin disait Jigoro Kano.

 

L’essence du jiu-jitsu et de la plupart des arts martiaux japonais est profondément non-violente. Elle repose sur le principe de non-résistance qui consiste à utiliser l’attaque de l’adversaire pour le mener à sa propre perte. Celui qui se défend, au lieu d’essayer de bloquer le mouvement adverse, l’esquive et le canalise de façon à le retourner contre l’agresseur. Si l’adversaire pousse, il suffit d’esquiver ou de le tirer pour qu’il tombe de lui-même. S’il tire il n’y a qu’à le pousser. Plus l’attaque est puissante plus le choc en retour est désastreux. Le principe de non-résistance conduit l’attaquant à devenir la victime de sa propre attaque et à récolter le fruit de ses mauvaises intentions.

 

Amis de la FFJDA, vous êtes sur la bonne voie, ne vous laissez décourager ni par les turbulences aléatoires et médiatiques ni par les vociférations des cabots. Pratiquez, perfectionnez-vous, acceptez les critiques et transformez les en chemin de victoire sur vous-mêmes, c’est la seule victoire intéressante.

 

Ici et maintenant.

Xian

Christian Drèze

Kyoshi Nihon Jitsu

En remerciement, à Christian dit Xian pour son apport de connaissance du Ju-Jutsu, auteur de la chronique du mois d'octobre 2006, à une question que je me posai sur celui-ci en France et dans le monde actuel, à Stéphane dit Sutefuan pour l'autorisation de publication de son auteur. Jean-Claude dit Yan-Korode.